Le premier classement des clubs de L1 selon leurs « richesses cachées »

Valeur des joueurs en formation et plus-values potentielles sur les joueurs achetés : un « Trophée de l’immatériel » récompensera en novembre le club de Ligue 1 disposant des plus belles « richesses cachées »… et sachant le mieux les transformer en cash.

J.LB. 02 octobre 2020 à 10h00 – L’Equipe
Baromètre des clubs de football

Lors de l’événement BIG organisé ce jeudi à Paris par la BPI (Banque publique d’investissement), en présence du président de la République, cinq clubs de Ligue 1 – Lille, Lyon, Marseille, Paris-SG et Saint-Étienne – ont été nommés pour le Trophée de l’immatériel dans la catégorie football, une distinction qui sera remise à l’un d’entre eux par l’Observatoire de l’Immatériel le 26 novembre à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).

Une façon d’attirer l’attention sur les « valeurs cachées » des entreprises du foot professionnel. « Elles sont colossales », selon Pierre Caillet, fondateur de l’agence de notation Ginkyo, à l’origine du premier « Baromètre de l’immatériel des clubs de football ».

Ce que les financiers désignent sous ce vocable d’« immatériel » regroupe l’ensemble des valeurs qui ne sont pas comptabilisées dans les actifs d’une entreprise à l’instant T mais participent néanmoins à sa richesse. Pour les clubs, dont le capital joueurs est très souvent l’actif numéro un, l’immatériel se niche pour l’essentiel dans leur vestiaire.

La valeur immatérielle d’un effectif est trois fois supérieure à sa valeur inscrite au bilan

« Il y a un paradoxe dans la comptabilité des entreprises en général et des clubs en particulier : lorsqu’il y a création de valeur par l’invention d’un produit, la création d’une marque ou la formation d’un joueur, cette valeur ne trouve pas de traduction financière dans les bilans car elle n’est pas issue d’un transfert d’argent », pointe Pierre Caillet. Cette valeur non écrite compte pourtant beaucoup, ne serait-ce que pour évaluer le prix de vente d’un club.

Première valeur immatérielle dans le football : les joueurs en formation qui n’apparaissent pas dans le bilan financier de leur club alors même qu’ils ont une valeur sur le marché des transferts. De même, quand un club dépense une somme X pour acheter un joueur, celle-ci est amortie sur la durée de son contrat, ce qui fait que la valeur comptable du joueur est rapidement dépassée par sa valeur réelle sur le marché – à condition qu’il se « mette en valeur » par ses performances.

Mises bout à bout, la valeur des joueurs en formation et les plus-values potentielles sur les joueurs achetés constituent un trésor estimé pour la Ligue 1 à trois fois la valeur du capital joueurs inscrit aux bilans des clubs. Au 30 juin 2019, date de clôture des comptes de la saison 2018-2019, la valeur moyenne du capital joueurs au bilan d’un club de L1 était de 52,4 M€, alors que la valeur estimée de ce même effectif sur le marché des transferts atteignait 148,4 M€. Pour plus de 50 % des clubs, la valeur immatérielle de leur capital joueurs dépasse de loin la valeur de leur actif comptable.

L’OL champion des valeurs de la formation, le PSG premier pour les plus-values potentielles sur les joueurs achetés

Dans le détail – et sans surprise – l’Olympique lyonnais ressort en première position du classement des plus-value potentielles sur les joueurs formés au club (seuls les joueurs ayant joué plus de 500 minutes en équipe première ont été pris en compte dans l’étude). Le champion français de la formation devance le PSG, l’OM, Nantes et, moins attendu à ce niveau, Nîmes, de retour en L1 en 2018-2019. « Outre l’effet promotion sur la valeur des joueurs formés au club, leur nombre dans l’effectif pro cette saison-là a joué dans leur valorisation générale, alors que les premiers du classement ont créé de la valeur sur un nombre plus limité de joueurs mais plus chers », éclaire Pierre Caillet.

Au classement des plus-values potentielles sur les joueurs achetés, c’est cette fois le PSG qui devance l’OL. Un effet notamment de la fusée Kylian Mbappé. Au 30 juin 2019, le champion du monde avait déjà accompli deux des cinq années de son contrat à Paris. Son coût d’achat (180 M€) était donc déjà en partie amorti et sa valeur comptable bien inférieure à sa valeur estimée sur le marché, 200 M€ minimum à l’époque.

« La crise sanitaire a fait baisser la valeur moyenne des effectifs de l’ordre de 20 % »

Pierre Caillet, fondateur de l’agence de notation Ginkyo

Former des joueurs à fort potentiel et acheter malin sur le marché des transferts ne suffit pas, encore faut-il convertir concrètement ces promesses en espèces sonnantes et trébuchantes. Cette étape ou l’immatériel trouve une traduction en cash est l’objet d’un troisième et dernier classement du Baromètre où les clubs sont hiérarchisés en fonction des plus-values globales réelles qu’ils ont effectuées lors du mercato estival 2019, aussi bien sur les joueurs formés au club que sur les reventes de joueurs achetés. Dans ce compartiment du jeu, l’OL devance Lille d’une poignée de millions d’euros, la preuve que cohabitent deux modèles économiques, l’un à Lille axé sur le trading joueurs (toutes les plus-values proviennent de la revente de joueurs achetés), l’autre à Lyon où la vente des joueurs formés apporte un cinquième environ de la plus-value globale.

Le premier Baromètre de l’immatériel des clubs de football est publié dans le contexte particulier de la crise sanitaire. À quel point la valeur des joueurs a-t-elle baissé depuis que l’agence a produit ses calculs ? « L’arrêt de la Ligue 1 a fait baisser la valeur moyenne des effectifs de l’ordre de 20  %, répond Pierre Caillet. Mais c’est le marché réel qui va nous donner la vraie ampleur du phénomène. Ce sera notre travail dès la fermeture du mercato d’analyser la réalité de l’impact du Covid-19 pour ajuster nos modèles mathématiques et réévaluer la richesse immatérielle des clubs. » Le marché sera clos lundi prochain à 23h59.


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